Theories du langage et theories du pouvoir en France, 1800-1848
Résumé
La manière dont les différentes coteries philosophiques en France abordent l’héritage de la linguistique des Lumières, la manière dont elles se confrontent sur ce terrain, trahissent leurs attitudes respectives face aux problèmes moraux et politiques qui accompagnent la formation de l’Etat bourgeois entre 1800 et 1848. Les auteurs de ces débats sont, d’une part, les ‘théistes’ (Louis-Gabriel-Ambroise de Bonald, Joseph de Maistre, Félicité Robert Lamennais), qui réfutent le matérialisme des ‘athées’ (’l’école de Locke’: notamment Condillac et les Idéologues), et développent une théorie du langage conforme à leur propre projet de restauration des valeurs et des pouvoirs d’ancien régime; d’autre part, les médiateurs (Victor Cousin, Jean-Philibert Damiron), qui visent à réaliser en philosophie aussi bien qu’en politique un grand compromis éclectique conforme a la ‘générale modération’ souhaitée par la classe sociale qui sera la protagoniste de la Révolution de Juillet. Des produits de cette philosophie médiatrice en linguistique sont encore l’essai de Pierre-Simon Ballanche sur les institutions sociales (1818), où il développe une théorie de la Parole qui suppose la nécessité historique de l’hégémonie bourgeoise, et celui d’Ernest Renan sur l’origine du langage (1848), où le spiritualisme français et la philologie d’école allemande se confirment réciproquement.