Une traduction arabe de la grammaire de Lhomond (1857)

Mohamed-Fadhel Bechraoui
Résumé

Le succès de la grammaire scolaire dans la France du XIXe siècle avait favorisé la traduction de certains de ses manuels, comme le Lhomond ou le Noël et Chapsal, pour servir de méthodes d’apprentissage aux étrangers. Le Lhomond tout particulièrement, après la traduction anglaise de Longfellow (1830) avait connu une traduction arabe, publiée à Paris en 1857 par un Tunisien du nom de Soliman al-Haraïri (1824–1877). Il y développe en fait, une double traduction: traduction libre et traduction littérale. Cette dernière, très paradoxalement, constitue le noyau d’une méthode présentée par l’auteur comme une invention didactique à laquelle il n’a jamais été précédé. L’effort de traduction y est considérable par rapport à ce que l’on trouve dans l’ouvrage anglais. La langue arabe, ainsi que la grammatisation autochtone qui s’y rapporte sont tellement éloignées du français et de sa grammatisation que le traducteur est amené à faire œuvre de linguiste et non de simple traducteur. La traduction de la terminologie, comme celle des exemples et des paradigmes, nécessite en effet une grande connaissance de l’arabe et de sa grammaire. Le recours au dialecte marque d’ailleurs l’épuisement des ressources de l’arabe classique. La transcription s’y ajoute pour faire encore reculer l’écart, au-delà de la grammaire et du système phonologique, jusqu’à l’écriture elle-même. Les éléments d’une recherche contrastive viennent, en outre, accompagner la traduction littérale comme pour en retracer les limites et révéler les irréductibles difficultés de l’apprentissage. Mais la correspondance entre les deux langues, incarnée dans cette traduction, a été expressément exagérée pour gagner plus de terrain dans le rapprochement du Lhomond, dans sa langue originale, à l’élève arabe. L’objectif étant de le mettre immédiatement en contact avec la langue française, via ce pré-texte qu’est la traduction littérale. Quant à la traduction libre, elle est considérée comme superflue, ne pouvant profiter qu’à l’élève français censé y trouver un ‘guide de bien traduire’.

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