Maeve Olohanles étudiantes des Masters « Transferts Culturels et Traduction Espagnol-Anglais » (TCT) et « Identités et Transferts Culturels » (ITC) de l’Université de Limoges, France, promo 2019-2020 et al. À quelle fréquence les contractions sont-elles employées ?

Traduction
À quelle fréquence les contractions sont-elles employées ? Étude des formes contractées dans le Translational English Corpus (TEC) [How frequent are the contractions? A study of contracted forms in the Translational English Corpus]

Maeve OlohanUniversité de Manchester, UK
Traduit par les étudiantes des Masters « Transferts Culturels et Traduction Espagnol-Anglais » (TCT) et « Identités et Transferts Culturels » (ITC) de l’Université de Limoges, France, promo 2019-2020, sous la direction de Georges Fournier1 et Cindy Lefebvre-Scodeller11University of Limoges, France

Cet article étudie les formes contractées en traduction, à partir d’une comparaison de traductions anglaises de textes fictionnels et biographiques avec des textes similaires d’auteurs écrivant directement en anglais. On peut relever des différences notables entre l’anglais de traductions littéraires et celui d’œuvres littéraires contemporaines, quant à la variété et à la fréquence des formes contractées employées. Des analyses qualitatives portent sur les fonctions de quelques formes contractées et non contractées, ainsi que sur les pratiques contractives de traducteurs différents. L’article évoque ensuite les rapports entre les contractions et d’autres formes linguistiques, l’explicitation en traduction, le style du traducteur, la fonction et le genre du discours, et propose pour finir de futures pistes de recherche dans ces domaines.

Mots clés :
  • traductologie de corpus,
  • Translational English Corpus ,
  • traductions littéraires en anglais,
  • contractions,
  • formes contractées,
  • explicitation,
  • style du traducteur,
  • analyse du registre
Table des matières

1.L’utilisation de corpus en traductologie

Le recours à des recueils de textes électroniques, que l’on compile selon des critères et des problématiques de recherche spécifiques, afin d’analyser les occurrences de schémas ou de caractéristiques linguistiques, est une approche relativement récente dans la recherche en traductologie mais qui a rapidement gagné en popularité. Les corpus permettent d’exploiter une vaste banque de données de traduction authentiques et d’y déceler, rapidement et facilement, des schémas et des tendances ; ils se compilent sans difficulté et les logiciels de corpus à l’instar de Wordsmith Tools 11. Wordsmith Tools, conçue par Mike Scott et distribuée par Oxford University Press, est une suite intégrée de programmes qui permet d’étudier des corpus. sont très simples d’utilisation. C’est pour toutes ces raisons que la recherche sur corpus en traductologie a récemment connu un franc succès, occupant une place de plus en plus importante dans les ateliers, les conférences, les formations d’étudiants de troisième cycle, etc. Cependant, adopter des méthodes de recherche propres à d’autres disciplines peut se révéler problématique : on risque trop facilement de les employer sans discernement et sans comprendre suffisamment leur portée ou leur importance, ou sans considérer correctement leur degré d’applicabilité et d’utilité dans la recherche portant sur un objet d’étude spécifique. En guise d’introduction à l’utilisation de corpus comparables en traductologie, sont ici pris en compte les mises en garde et conseils de deux traductologues. Leurs points de vue permettent de souligner de façon générale les points forts et les limites de la traductologie de corpus et posent le cadre de l’analyse qui suit.

L’étude de Maria Tymoczko (1998), publiée dans un article qui clôt le numéro spécial de Meta consacré à la traductologie de corpus, souligne les avantages de l’utilisation de corpus pour la recherche en traductologie, mais elle remet également en question l’idée selon laquelle la traductologie de corpus peut servir à établir des règles de traduction universelles. Premièrement, Tymoczko soutient que la subjectivité du chercheur (son jugement et ses intuitions) est présente à toutes les étapes de l’analyse du corpus, depuis la décision même de mener ce type de recherche jusqu’au choix des problématiques ; depuis les décisions relatives à la forme du corpus jusqu’à l’interprétation des résultats. Deuxièmement, la difficulté à définir le concept de traduction, due notamment à la divergence d’opinions en fonction des cultures et des époques, signifie que la quête de règles générales de traduction (que l’on utilise des corpus ou non) risque fort d’être vouée à l’échec (ibid. : 653–656). Tymoczko déconseille également de trop se concentrer sur les similitudes, qui mènent à des points de vue binaires de rapports d’égalité et d’inégalité, mais reconnaît le potentiel des études sur corpus pour souligner la différence (davantage en termes de diversité, de variété, de spécificité culturelle et linguistique qu’en termes de divergence). Considérant là encore un aspect positif, Tymoczko soutient que la traductologie de corpus peut aider à intégrer les approches linguistiques et culturelles de la traduction, à étudier comment l’idéologie influence la traduction et plus largement, à aborder les problèmes méthodologiques que soulèvent l’application et l’adaptation de la technologie aux besoins de la traductologie (ibid. : 657).

Dans une étude sur les connecteurs logiques et leurs traductions, Ian Mason (2001) a également réfléchi aux difficultés que peut poser l’analyse sur corpus en traduction, en particulier depuis la perspective de la linguistique contrastive. Il prend en compte plusieurs études antérieures qui concluaient que, là où il y avait juxtaposition sans connecteur en français, la traduction en anglais employait explicitement une coordination. Il remet en question la validité de ce jugement comme norme contrastive du comportement discursif, en partie en prouvant que dans le cas de la traduction de l’anglais vers le français, l’inverse ne fonctionne pas (c’est-à-dire que la conjonction adversative explicite n’est pas supprimée dans les traductions françaises). En outre, il a mis en évidence un certain degré́ d’explicitation dans les traductions de l’anglais au français. Les conclusions de Mason semblent accorder plus d’importance à l’idée selon laquelle « les traducteurs ont tendance à expliciter, indépendamment des langues ou du sens de traduction, plutôt qu’à l’hypothèse selon laquelle les traducteurs répondent à des normes linguistiques contrastives quant à l’emploi des connecteurs »aa.La citation originale de Ian Mason est la suivante : “[…] translators tend towards explicitation irrespective of the languages or direction of translating, rather than the hypothesis that translators respond to contrastive language norms for the use of junction”. (ibid. : 68). D’un côté, Mason préconise l’analyse contrastive de « textes sources authentiques dans chaque langue »bb.La citation originale de Ian Mason est la suivante : “spontaneously sourced texts in each language”. (ibid.) pour démontrer la présence de normes de comportement langagier dans les deux langues. De l’autre, l’analyse des textes sources et de leur traduction nous fournit des informations sur le comportement du traducteur, d’autant plus quand on compare cette analyse aux données issues de l’analyse des textes sources authentiques. Toutefois, bien qu’il reconnaisse le potentiel des corpus comparables et parallèles de ce type, Mason est prudent quant aux généralisations à partir d’analyses contrastives typiques fondées sur la concordance, qui considèrent les phrases isolément et ignorent « les intentions rhétoriques qui les génèrent »cc.La citation originale de Ian Mason est la suivante : “the rhetorical purposes which give rise to them”. (ibid. : 71). Un manque de correspondance entre la texture du texte source (TS) et celle du texte cible (TC) ne signifie pas nécessairement qu’il n’y ait pas conformité à certaines normes. La sensibilité aux facteurs contextuels et co-textuels est cruciale ; l’analyse doit prendre en compte l’influence du genre, du discours et de l’intention textuelle sur les choix faits par l’auteur du texte source et par le traducteur. De plus, le comportement du traducteur peut répondre à d’autres motivations, tels que les objectifs communicationnels des producteurs de textes ou l’orientation du traducteur (ou skopos), si bien que le comportement varie d’un traducteur à l’autre et d’une tâche à l’autre (ibid. : 77–78).

A ce titre, Mason souligne que le but de la traductologie de corpus ne devrait pas être d’aboutir à de vagues généralisations fondées sur des données quantitatives, mais bien de combiner les analyses quantitative et qualitative afin d’explorer les facteurs pragmatiques associés aux discours, aux genres et aux formes de textes, comme mentionné précédemment (ibid. : 78). Cela corrobore ainsi l’avis de Tymoczko (1998), qui estime qu’il ne faut pas accorder trop d’importance à la nature « scientifique » de cette recherche, à la quantification, et surtout à son utilisation pour « prouver l’évidence »dd.Les citations originales de Maria Tymoczko sont les suivantes : “scientific”, “prove the obvious”. (ibid. : 658). Elle déconseille d’adopter une perspective étroite dans laquelle le passé et les autres cultures ne sont pas pris en considération et qui reste « enfermée dans les normes de traduction actuelles, … présupposant de telles normes dans l’élaboration du corpus. »ee.La citation originale de Maria Tymoczko est la suivante : “locked into the translation norms of the present, … presupposing such norms in the construction of corpora”. Conscients de tels écueils, de nombreux spécialistes qui travaillent sur corpus (par exemple Baker 2000 ; Kenny 2001 ; Laviosa 1998 ; Mauranen 2000 ; Zanettin 2000, Øverås 1998) se sont concentrés sur la conception de corpus et le développement de méthodologies propres à la traductologie, tout en soulignant la nécessité d’aller au-delà des schémas observés, etc., afin de relier les conclusions et les réalisations linguistiques au contexte et aux processus de traduction, ainsi qu’au style du traducteur. Présenter un panorama de ces études sur corpus (ou d’autres) dépasse le cadre du présent article, mais les lecteurs peuvent consulter le numéro spécial de Méta (Vol. 43, No 4 [1998]) et les publications précédemment citées pour plus de détails. Il est à noter que la suite de cet article se concentrera sur une méthodologie propre à l’étude de textes traduits, à savoir l’utilisation de corpus comparables (définis dans la partie suivante), et en particulier de l’un d’entre eux, le Translational English Corpus (TEC).

2.L’utilisation d’un corpus comparable pour étudier la traduction

L’un des concepts fondamentaux en traductologie de corpus est la notion de corpus comparable telle que l’a définie Mona Baker :

deux recueils différents de textes dans la même langue : un corpus composé de textes originaux dans la langue en question et l’autre composé de traductions dans cette langue à partir d’une ou plusieurs langues sources… les deux corpus doivent couvrir un même domaine, une même variété de langue et une même période et être de longueur comparable.(Baker 1995 : 234)ff.La citation originale de Mona Baker est la suivante : “two separate collections of texts in the same language: one corpus consists of original texts in the language in question and the other consists of translations in that language from a given source language or languages… both corpora should cover a similar domain, variety of language and time span, and be of comparable length”.

Les premiers travaux novateurs de Baker ont mis en avant un certain nombre de caractéristiques propres à la traduction qui peuvent être étudiées en utilisant des corpus comparables (Baker 1996) : par exemple, les traductions ont tendance à être plus explicites que les textes originaux à bien des niveaux. Elles les simplifient, normalisent ou standardisent de diverses façons. Il est important de signaler que cette définition du corpus comparable peut différer de celle d’autres spécialistes ; il existe des variantes en traductologie et en linguistique de corpus concernant l’utilisation de termes comme corpus parallèle, corpus de traduction et corpus comparable. Cet article repose sur l’acception de Baker. Il faut aussi préciser qu’une analyse de corpus de ce genre n’utilise pas les textes sources – ils ne sont pas conservés au format numérique et ne peuvent pas être comparés à leurs traductions. L’analyse se focalise plutôt sur les traductions en tant qu’exemples d’utilisation de la langue, que l’on compare avec des textes non traduits dans cette même langue.

Les données analysées dans cet article sont extraites, d’une part, du Translational English Corpus (TEC), actuellement conservé au Centre de traductologie et d’études interculturelles (Center for Translation and Intercultural Studies) à l’Université de Manchester22.Le TEC est disponible sur le site web du School of Modern Languages de l’Université de Manchester : http://​www​.art​.man​.ac​.uk​/sml et peut être également consulté sur http://​ronaldo​.cs​.tcd​.ie​/tec. et, d’autre part, d’un corpus comparable issu d’une sélection de textes appartenant à la section Écriture créative et imaginativegg.Plus connue sous le nom de « imaginative writing section ». du British National Corpus (BNC). Le Translational English Corpus est mis à jour en permanence, ce qui veut dire que les études qui se sont succédées présentent des données du TEC à différentes étapes de son évolution. Ainsi, l’étude de Olohan et Baker (2000) sur le subordonnant that combiné aux verbes say et tell utilisait des données du TEC quand celui-ci faisait environ la moitié de sa taille actuelle ; le BNC, utilisé à titre de comparaison, contenait lui aussi moins de données que le corpus que l’on utilise dans cette étude. De même, les mesures quantitatives données dans Olohan (2001) pour certaines caractéristiques analysées ici reposent également sur deux corpus légèrement plus petits ; elles portent ici la référence (2001), quand cela s’y prête. Le Tableau 1 présente les principales caractéristiques du TEC et du sous-corpus du BNC (désormais simplement appelé BNC pour plus de commodité) utilisées dans la présente analyse :

Tableau 1.Caractéristiques du sous-corpus du BNC et du TEC
BNC TEC
Tokens 33.Les tokens réfèrent au nombre de mots dans un texte, y compris les mots répétés. Les types font référence au nombre de mots distincts dans un texte, c’est-à-dire, sans compter les répétitions. 6 382 557 6 238 635
Types 44.Voir la note précédente pour une brève explication concernant les types et les tokens.   74 346   75 780
Contenu Extraits d’une longueur de 40 000 mots non traduits en anglais provenant de la section Écriture créative et imaginative du BNC Textes entiers d’œuvres de fiction et de biographies traduits vers l’anglais depuis un éventail de langues

3.Approche et recherche préliminaire

Une étude menée par Olohan et Baker (2000) indiquait que la conjonction that après les verbes de parole say et tell dans des constructions de types [1] et [2] était davantage utilisée dans le TEC que dans le sous-corpus du BNC, ce qui pourrait indiquer qu’il peut y avoir une tendance à l’explicitation en traduction. Olohan (2001) a poussé plus loin cet axe de recherche en examinant un verbe moins commun – promise – qui peut lui aussi se construire avec ou sans that (Exemples [3] et [4]). Le même schéma se retrouve dans le BNC comme dans le TEC (soit en anglais non traduit et en anglais traduit).

[1]

He said that a lot of people in Lisbon had asked after me (TEC)

[2]

Father tells her Ø he doesn’t eat out of other people’s fleshpots (TEC)

[3]

I can’t promise that I will ever be able to change that. (BNC)

[4]

I promise you Ø we’ll be discreet (BNC)

Comme il est dit dans l’article d’Olohan et Baker (2000), la littérature linguistique traitant de l’emploi et de l’omission de that avec ces verbes ou d’autres indique que l’omission est plus susceptible d’apparaître dans les contextes informels. En partant du principe que l’emploi des formes contractées telles que can’t, don’t, it’s, they’ve, etc., pourrait relever du registre informel en anglais, les deux auteurs ont émis l’hypothèse que lorsque that est omis, alors les contractions sont employées. Ce phénomène a tout d’abord été vérifié avec promise. Ces concordances ont de nouveau été examinées, cette fois-ci en cherchant les formes contractées adjacentes au verbe (c’est-à-dire dans le co-texte que représente la ligne de concordance). Une corrélation indéniable a été observée dans les deux corpus entre l’emploi des formes contractées et l’omission de that. Ainsi, lorsque l’on compare les deux corpus, même s’il y a des différences marquées entre l’emploi de that avec promise et l’emploi de formes contractées, la probabilité de co-occurrence d’une forme contractée et de l’omission de that sur la même ligne de concordance est très similaire. En d’autres termes, on trouve dans les textes du BNC une tendance à l’omission de that après le verbe promise et à l’emploi de contraction dans le co-texte, tandis que dans les textes du TEC, on observe plutôt une tendance à utiliser that et à éviter les contractions. Ces observations ont soulevé une question intéressante qui méritait d’être approfondie : puisque les contractions et les omissions de cette nature dépendent du niveau de familiarité du registre, on pourrait supposer que les textes du TEC sont plus formels et recourent en général moins aux formes contractées. On pourrait vérifier cette hypothèse grâce à une étude comparative approfondie des formes contractées dans le TEC et dans le BNC.

3.1’s

En utilisant la fonction WordList sur Wordsmith Tools, une liste détaillant toutes les formes lexicales a été établie pour chacun des corpus. Toutes les formes contenant des apostrophes ont ensuite été extraites de chaque liste. L’emploi le plus courant de l’apostrophe en anglais dans les formes lexicales, qui totalise des dizaines de milliers d’exemples dans les deux corpus, est celui de ’s. Cela n’est guère surprenant étant donné que le génitif anglais se forme à partir de ce suffixe et qu’il s’agit aussi de la forme contractée de is et has, formes verbales très courantes en anglais. Le nombre total des différentes formes en *’s (types) est similaire dans les deux corpus, comme indiqué dans le Tableau 2.55.L’astérisque (*) sert de joker dans tout l’article pour dénoter une suite de caractères, et non pour indiquer un élément irrecevable comme c’est généralement le cas dans les publications de linguistique.

La plupart de ces formes sont des suffixes du génitif, employés avec des noms propres et des noms communs, et nombre d’entre eux n’apparaissaient qu’une ou deux fois. De plus, le BNC contenait 12 formes qui n’étaient pas des noms portant le suffixe du génitif, mais des contractions verbales (ou la contraction du pronom objet us dans le cas de let’s).

Tableau 2.Occurrences de la forme ’s dans le BNC et dans le TEC (2001)
BNC TEC
différentes formes en *’s 4 818 4 623

On retrouvait 11 de ces 12 formes dans le TEC, et elles apparaissaient dans un ordre de fréquence légèrement différent, les occurrences de there’s et he’s et celles de how’s et here’s étant respectivement inversées. La seule forme recensée 102 fois dans les textes du BNC mais pas une seule fois dans le TEC était e’s, variante dialectale ou régionale de he’s où le h a disparu. Malgré l’ordre de fréquence similaire des autres formes de ’s, on remarque immédiatement que chaque forme est moins présente dans le TEC que dans le BNC. Les formes présentes dans chaque corpus sont listées dans le Tableau 3 par ordre de fréquence décroissant.

Tableau 3.Liste des formes de ’s qui ne sont pas au génitif dans le BNC et dans le TEC (2001)
BNC TEC
Forme Occurrences Forme Occurrences
it’s 9 554 it’s 5 046
that’s 4 650 that’s 2 640
there’s 2 655 he’s 1 951
he’s 2 628 there’s 1 424
she’s 2 266 she’s 1 154
what’s 1 601 what’s 1 021
let’s   913 let’s   654
who’s   396 who’s   334
where’s   241 where’s   117
how’s   146 here’s    89
here’s   132 how’s    36
e’s   102

3.2’ll, ’d, ’t, ’ve, ’re

La contraction verbale qui présentait le plus grand nombre de formes différentes était *’ll, tandis que la contraction la plus fréquente était celle de not en n’t. On constate certaines différences en termes de types et de tokens à travers les corpus, comme le montre le Tableau 4. Parmi les contractions verbales fréquentes, on ne retrouvait pas, dans les catégories ci-dessus, celle de la première personne du singulier de BE au présent de l’indicatif, I’m.

Tableau 4.Contractions verbales et contractions de not dans le BNC et dans le TEC (2001)
BNC TEC
Types Tokens Types Tokens
’ll 212  9 651 43  4 799
’d 111 10 645 29  5 349
’ve  53  7 768 17  4 068
’t  48 40 782 30 20 316
’re  12  7 344 8  4 250

3.3Autres contractions

La plupart des contractions introduites ci dessus concernent soit les verbes be, have et will soit la négation not.

Le BNC, en particulier, contenait un ensemble d’autres types de contractions, y compris la contraction de modificateurs multisyllabiques, par exemple actu’lly, accident’lly, contradict’ry, prob’ly, fav’rite, gen’rous. Certaines interjections présentaient également des formes contractées, comme ah’m et fuck’em. Apparaissaient aussi des variantes régionales, telles que l’élision du h dans be’aviour, be’ind, ware’ouse ou les formes écossaises do’na et hav’na (où il n’y a en fait aucune élision entre les deux mots), ainsi qu’un certain nombre d’autres formes verbales contractées, telles que c’mere pour come here, c’mon pour come on, sh’ll et s’pose. On retrouvait quelques contractions nominales exceptionnelles telles que fam’ly, di’mond et quelques formes lexicalisées telles que hallowe’en et ma’am. Toujours dans le BNC, et dans une moindre mesure dans le TEC, figuraient aussi les patronymes irlandais tels que O’Neill, et ’n apparaissait comme contraction de ing (par exemple dans bleed’n), ou de and (this’n) et de than (better’n). Les formes contractées du type l’*, c’est-à-dire les contractions de le ou la en français (par exemple, l’armée, l’artiste, l’art, l’empire, l’enfant et l’esprit) étaient plus fréquentes dans le TEC que dans le BNC, le TEC présentant à la fois une plus grande variété de formes et un nombre total d’occurrences plus élevé. La forme plus courante d’*, contraction de la préposition de, elle aussi française, est plus fréquente dans le BNC (faisant souvent partie d’un nom comme pour D’Arcy), mais le TEC présente là encore une plus grande variété de formes. Une autre forme contractée en français, j’* (contraction de je, par exemple j’accuse, j’ai, j’aime, j’avais) était très rare dans les deux corpus bien que légèrement plus fréquente dans le BNC.

Tableau 5.Occurrences de I’m dans le BNC et dans le TEC (2001)
BNC TEC
I’m 8 773 4 256
Tableau 6.Formes dérivées du français (2001)
BNC TEC
Types Tokens Types Tokens
l’* 36  66 114 212
j’*  6   7   4   5
d’* 50 478  99 228

Pour finir, les autres formes trouvées étaient d’* (= do), y’* (= you), th’* (= thou) et t’* (= to the). Celles-ci sont souvent utilisées pour indiquer une langue régionale ou dialectale et toutes apparaissent beaucoup plus fréquemment dans le BNC que dans le TEC : par exemple, y’know apparaît 22 fois dans le BNC et une seule fois dans le TEC et d’you 362 fois dans le BNC contre 72 fois dans le TEC.

4.Analyse quantitative plus détaillée

Un rapide coup d’œil aux données présentées ci-dessus révèle qu’il y a davantage d’occurrences et une plus grande variété de formes contractées dans le BNC que dans le TEC. Dans bien des cas, le nombre d’occurrences d’une forme donnée dans le BNC est le double de celui observé dans le TEC. Toutes les formes énumérées ci-dessus apparaissent plus fréquemment dans le BNC, à l’exception des formes issues du français l’* et d’*. Cependant, avant de tirer des conclusions générales concernant ces chiffres, observons plus en détails certaines de ces occurrences. Comme susmentionné, ces données initiales proviennent d’une version plus courte de chacun des corpus. Le reste de l’analyse a été effectué sur des versions plus récentes, si bien que certains de ces calculs ont été refaits, et une partie des données a alors été analysée avec plus de minutie. La première étape a consisté à réexaminer certaines formes contractées, en regardant cette fois non seulement les occurrences de la forme contractée mais aussi en calculant les occurrences de la forme alternative pleine. En s’appuyant sur les différences de l’ensemble des occurrences des contractions présentes dans les deux corpus, on a émis l’hypothèse d’une tendance générale à utiliser des formes pleines dans le TEC et des formes contractées dans le BNC.

Tableau 7.Quelques contractions dialectales dans le BNC et dans le TEC (2001)
BNC TEC
Types Tokens Types Tokens
d’*  3 418 3 84
t’* 99 126 0  0
y’* 22  53 7  7

4.1Retour sur ’s et les contractions verbales

Certaines des contractions *’s (hormis génitif) sont ambiguës hors contexte parce qu’elles peuvent renvoyer à plus d’une forme pleine, par exemple that’s peut correspondre à that is comme en [5] ou à that has comme en [6].

[5]

That’s a dreadful thing to say (BNC)

[6]

Everything that’s been cleansed is, in his opinion, nothing more than a fine ice cold stream of air (TEC)

Dans tous ces exemples, la fréquence des formes contractées a été comparée avec la fréquence cumulée des formes pleines de is et de has.66.Une analyse ultérieure (voir les Tableaux 10 et 11) distingue deux formes pour he’s et she’s, respectivement he is et he has, et she is et she has. Les formes pleines et contractées de has dans ces exemples apparaissent généralement moins que les formes pleines et contractées de is. Dans les cas de who’s, where’s, how’s et here’s, comme il s’agit uniquement de contractions de is, ces formes contractées ont été comparées à leurs formes pleines respectives : who is, where is, how is et here is. Le Tableau 8 donne les fréquences brutes pour les contractions les plus courantes en ’s ; quant au Tableau 9, il les montre sous forme de pourcentage du nombre total d’occurrences de formes pleines et contractées combinées. Les occurrences qui prédominent sont grisées dans les deux tableaux.

Les premiers calculs ont révélé qu’il y avait davantage de formes contractées dans le BNC que dans le TEC. À présent, en regardant aussi le nombre de formes pleines ainsi que le total des formes pleines et contractées, on peut remarquer que pour toutes les contractions en *’s, la forme contractée dans le BNC est considérablement plus fréquente que la forme pleine. Cela ne s’applique pas au TEC, où la forme pleine est plus fréquente dans 8 formes sur 11. Bien que majoritaire dans le cas de that’s, what’s et let’s, la forme contractée représente un pourcentage inférieur à celui du total de leurs formes pleines et contractées dans le BNC.

D’autres contractions verbales courantes sont présentées dans le Tableau 10 (fréquences brutes) et dans le Tableau 11 (pourcentage des occurrences totales). Biber et al. (1999 : 1130) remarquent que dans les conversations, les textes de fiction et les articles de presse, am (la forme de be à la première personne) a plus tendance à être contractée que la forme is, elle-même plus susceptible d’être contractée que la forme are. Il s’agit d’un schéma général, c’est-à-dire qu’il n’est pas spécifique à l’emploi des contractions avec pronoms comme celui examiné ici. Toutefois, ces probabilités se reflètent également dans les données du BNC où l’ordre de probabilité de contraction des formes est le suivant : I’m (80%), she’s (75%), he’s (73%), you’re (69%), we’re (66%), et they’re (63%). Le TEC présente un schéma légèrement différent avec des formes dans l’ordre de probabilité de contraction suivant : you’re (58%), he’s (55%), she’s (54%), I’m (54%), we’re (47%), they’re (36%), où l’on voit que am, en particulier, se situe nettement plus bas que dans la liste du BNC et dans les données de Biber. Le Graphique 1 montre le pourcentage des formes contractées du verbe be. Les Graphiques 2 et 3 montrent que le pourcentage des formes contractées de have et will (Tableaux 10 et 11) est également plus faible dans le TEC que dans le sous corpus du BNC.

Tableau 8.Fréquences brutes des contractions courantes en ’s dans le BNC et dans le TEC et leurs formes pleines correspondantes
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Total Contractées Pleines Total
it’s vs. it is + it has 10 405 3 121
(2 816+305)
13 526 4 925 5 804
(5 247+557)
10 729
that’s vs. that is + that has  4 953 1 087
(999+88)
6 040 2 592 2 275
(1 969+306)
 4 867
there’s vs. there is + there has  2 979 1 291
(1 233+58)
4 270 1 391 2 120
(2 056+64)
 3 511
he’s vs. he is + he has  3 936 1 743
(1 082+661)
5 679 1 926 3 188
(1 846+1 342)
 5 114
she’s vs. she is + she has  2 550 1 008
(652+356)
3 558 1 142 1 762
(1 095+667)
 2 904
what’s vs. what is + what has  1 680   744
(680+64)
2 424 1 018   882
(960+192)
 1 900
let’s vs. let us    952   195 1 147   654   422  1 076
who’s + who is    415   334   749   337   823  1 160
where’s vs. where is    256   197   453   117   143    260
how’s vs. how is    147   116   263    36    89    125
here’s vs. here is    139   114   253    88   198    286
Tableau 9.Formes contractées et pleines en ’s dans le BNC et dans le TEC, en pourcentage du total des formes contractées et des formes pleines cumulées
Formes BNC TEChh.Les traducteurs ont estimé que le tableau, dans l’article original, comportait une erreur : pour le TEC, la colonne correspondant aux formes pleines était entièrement grisée, alors que l’auteur indique dans le corps de son texte que ce sont les cases contenant les valeurs les plus importantes qui doivent l’être. Nous avons cru bon de corriger cette erreur.
Contractées Pleines Contractées Pleines
it’s vs. it is + it has 80% 20% 46% 54%
that’s vs. that is + that has 82% 18% 53% 47%
there’s vs. there is + there has 70% 30% 40% 60%
he’s vs. he is + he has 69% 31% 38% 62%
she’s vs. she is + she has 72% 28% 39% 61%
what’s vs. what is + what has 69% 31% 54% 46%
let’s vs. let us 83% 17% 61% 39%
who’s vs. who is 55% 45% 29% 71%
where’s vs. where is 57% 43% 45% 55%
how’s vs. how is 56% 44% 29% 71%
here’s vs. here is 55% 45% 31% 69%
Tableau 10.Fréquences brutes des contractions verbales et des formes pleines courantes dans le BNC et dans le TEC regroupées par verbes
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Total Contractées Pleines Total
I’ll vs. I will 4 267   771 5 038 1 807   659 2 466
you’ll vs. you will 1 666   812 2 478   874   804 1 678
she’ll vs. she will   404   174   578   190   252   442
he’ll vs. he will   674   288   962   463   538 1 001
it’ll vs. it will   487   562 1 049   189   513   702
we’ll vs. we will 1 247   262 1 509   786   212   998
they’ll vs. they will   548   279   827   286   398   684
I’ve vs. I have 4 135 2 591 6 726 2 070 3 717 5 787
you’ve vs. you have 2 096 1 651 3 747   918 1 368 2 286
she’s vs. she has   615   356   971   216   667   883
he’s vs. he has   970   661 1 631   422 1 342 1 764
we’ve vs. we have   997   938 1 935   618 1 045 1 663
they’ve vs. they have   509   493 1 002   344   814 1 158
I’m vs. I am 9 279 2 366 11 645 4 254 3 671 7 925
you’re vs. you are 4 550 2 075 6 625 2 239 1 639 3 878
she’s vs. she is 1 935   652 2 587   926 1 095 2 021
he’s vs. he is 2 966 1 082 4 048 1 504 1 846 3 350
we’re vs. we are 1 503   783 2 286 1 034 1 148 2 182
they’re vs. they are 1 686   989 2 675   927 1 680 2 607
Tableau 11.Contractions verbales et formes pleines courantes dans le BNC et le TEC, en pourcentage du total des formes contractées et des formes pleines cumulées, regroupées par verbe
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Contractées Pleines
I’ll vs. I will 85% 15% 73% 27%
you’ll vs. you will 67% 33% 52% 48%
she’ll vs. she will 70% 30% 43% 57%
he’ll vs. he will 70% 30% 46% 54%
it’ll vs. it will 46% 54% 27% 73%
we’ll vs. we will 83% 17% 79% 21%
they’ll vs. they will 66% 34% 42% 58%
I’ve vs. I have 61% 39% 36% 64%
you’ve vs. you have 56% 44% 40% 60%
she’s vs. she has 63% 37% 24% 76%
he’s vs. he has 59% 41% 24% 76%
we’ve vs. we have 52% 48% 37% 63%
they’ve vs. they have 51% 49% 30% 70%
I’m vs. I am 80% 20% 54% 46%
you’re vs. you are 69% 31% 58% 42%
she’s vs. she is 75% 25% 46% 54%
he’s vs. he is 73% 27% 45% 55%
we’re vs. we are 66% 34% 47% 53%
they’re vs. they are 63% 37% 36% 64%

4.2Contractions de not

Les contractions fréquentes de not ont aussi été relevées (voir Tableaux 12 et 13). Nous observons ici que la tendance générale est à la contraction dans les deux corpus. Cependant, le pourcentage de formes contractées s’avère dans tous les cas plus faible dans le TEC que dans le BNC. Concernant les deux formes couldn’t et wouldn’t, les textes du TEC sont davantage susceptibles de contenir la forme pleine. Biber et al. (1999 : 1131) montrent que do + not est contracté dans presque 100% des cas dans les conversations, dans environ 75% des cas pour la fiction, 60% dans les articles de presse et 5% dans les textes académiques. Nous pouvons remarquer qu’en moyenne, pour les formes don’t, doesn’t et didn’t, le taux de contraction de not combiné à do est, dans le BNC, de 74%, donc très proche du résultat donné par Biber qui est de 75% pour la fiction. En revanche, il est de 58% dans le TEC, ce qui est considérablement inférieur (ce taux est plus élevé dans les formes au présent dans les deux corpus). Le taux de contraction relevé par Biber et al., pour ce qui est des modaux + not, est de 65% dans les textes de fiction. En prenant le taux moyen de contraction pour les quatre formes modales présentées ici, nous obtenons un résultat de 76% pour le BNC. Cependant, la moyenne pour l’ensemble des formes modales est susceptible d’être moins élevée dans la mesure où nous n’avons pas inclus des formes telles que may + not, might + not, qui sont moins susceptibles d’être contractées que celles données ici. En comparaison, la moyenne est à nouveau bien plus basse pour le TEC, avec 52%.

5.Analyses qualitatives

5.1Here’s vs. here is

On peut noter que, pour la plupart des contractions verbales et des contractions de not, le total global des occurrences (c’est-à-dire le total combiné des formes pleines et contractées) est considérablement plus élevé dans le BNC que dans le TEC, malgré la taille quasiment identique des deux corpus. De ce fait, il serait intéressant de choisir une forme dont le total d’occurrences (c’est-à-dire le cumul des formes pleines et contractées) est similaire dans les deux corpus et de procéder à une analyse qualitative de leurs similitudes et de leurs différences. Les formes qui apparaissent avec une fréquence combinée similaire dans les deux corpus et pour lesquelles les occurrences sont suffisamment faibles pour permettre une analyse qualitative plus approfondie sont here’s et here is, avec un total de 253 formes pleines et contractées dans le BNC et 286 dans le TEC.

Graphique 1.Contractions de be dans le BNC et dans le TEC en pourcentage du total combiné des formes pleines et contractées
Graphique 1.
Graphique 2.Contractions de have dans le BNC et dans le TEC en pourcentage du total combiné des formes pleines et contractéesii.L’article original indiquait erronément « have » : cette erreur a été ici corrigée.
Graphique 2.
Graphique 3.Contractions de will dans le BNC et dans le TEC en pourcentage du total combiné des formes pleines et contractées
Graphique 3.
Tableau 12.Fréquences brutes pour les contractions courantes de not dans le BNC et dans le TEC
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Total Contractées Pleines Total
couldn’t vs. could not  3 307 1 742 5 049 1 316 2 102 3 418
can’t vs. cannot  3 757   696 4 453 1 864 1 601 3 465
wouldn’t vs. would not  2 626 1 164 3 790   978 1 267 2 245
won’t vs. will not  2 140   356 2 496 1 220   516 1 736
don’t vs. do not 11 448   614 12 062 5 788 1 480 7 268
doesn’t vs. does not  1 576   229 1 805 1 395 1 301 2 696
didn’t vs. did not  7 518 3 131 10 649 3 570 5 091 8 661
Tableau 13.Contractions courantes de not dans le BNC et dans le TEC en pourcentage du total combiné pour les formes pleines et contractées
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Contractées Pleines
couldn’t vs. could not 65% 35% 39% 61%
can’t vs. cannot 84% 16% 54% 46%
wouldn’t vs. would not 69% 31% 44% 56%
won’t vs. will not 86% 14% 70% 30%
don’t vs. do not 95% 5% 80% 20%
doesn’t vs. does not 87% 13% 52% 48%
didn’t vs. did not 71% 29% 41% 59%

Dans Biber et al., la forme here utilisée en tant qu’adverbe est très fréquente dans les conversations, en anglais britannique comme en anglais américain (2 200 occurrences par million de mots), et dans une moindre mesure dans les œuvres de fiction (1 200 fois par million de mots), contrairement aux articles de presse et aux textes académiques (seulement 200 à 400 fois par million de mot). Selon les auteurs,

les adverbes here et there démontrent l’usage de déictiques de lieu dans les conversations… Dans la fiction, l’utilisation de here, there, now et then est similaire à celle faite dans les conversations bien qu’ils fassent référence au monde fictif du texte et non au monde réel.(ibid. : 799)jj.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “the adverbials here and there show the use of deictic place reference in conversation…In fiction, the use of here, there, now and then is similar to conversation, though referring to the fictional world of the text rather than the real world.”

On s’attendait donc à ce que, dans les deux corpus, here dans here’s et here is endosse cette fonction déictique, principalement dans des dialogues de fiction. En examinant la proportion de formes contractées par rapport à l’ensemble des occurrences (c’est-à-dire le total combiné des formes pleines et contractées), on remarque qu’elles atteignent 55% dans le BNC et seulement 31% dans le TEC. Compte tenu de la fonction relativement évidente de here et de la similitude de l’ensemble des occurrences, il était difficile d’anticiper les raisons pour lesquelles on trouve des schémas de contraction différents dans les deux corpus. Y a-t-il moins de dialogues dans les textes du TEC et par conséquent moins de formes contractées en here’s ? Est ce que here peut occuper une autre fonction qui serait plus récurrente dans le TEC et plus susceptible d’être remplie par la forme pleine ? On pouvait espérer qu’une analyse descriptive détaillée de certains de ces schémas et des conventions d’usage de ces formes pleines et contractées dans les deux corpus apporte quelques explications.

Tableau 14.Fréquences brutes de la forme contractée here’s et la forme pleine correspondante here is dans le BNC et le TEC
BNC TEC
Contractée Pleine Total Contractée Pleine Total
here’s vs. here is 139 114 253 88 198 286

En analysant d’abord les 139 occurrences de here’s récoltées dans le BNC en utilisant la fonction Concord de Wordsmith Tools, on constate que la plupart d’entre elles (115 ou 83%) concerne des cas dans lesquels quelque chose ou quelqu’un est présenté à l’auditeur ou au lecteur, et où here est utilisé comme adverbe de lieu en position initiale, parfois précédé d’une interjection ou d’une conjonction, et suivi d’une inversion sujet-verbe (Exemples [7] à [11]). Biber et al. (1999 : 926) décrivent ces types de constructions comme « des schémas [d’inversion] plus ou moins figés »kk.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “more or less fixed patterns”.. Cette nature « figée » explique leur fréquence élevée dans les conversations, dans lesquelles on retrouve généralement moins d’inversions que dans l’anglais écrit, plus complexe d’un point de vue syntaxique.

[7]

Here’s your coffee (BNC)

[8]

Here’s Trish now (BNC)

[9]

Here’s the proof (BNC)

[10]

Here’s the flight of steps (BNC)

[11]

Here’s the deal (BNC)

Dans l’exemple [11], c’est une entité plus abstraite qui est introduite. Dans quelques autres cas, il s’agit d’un procédé ou d’une action, de sorte que here fait référence à une manière plutôt qu’à un lieu (Exemples [12] à [14]).

[12]

Here’s how it happened. (BNC)

[13]

Here’s how to eat spaghetti properly: (BNC)

[14]

here’s how to please – via his stomach (BNC)

Dans quatre cas (3%), here est employé en position médiane comme modificateur de lieu ([15] à [18]) :

[15]

The atmosphere here’s as thick as mud (BNC)

[16]

Alec here’s on his year out from college (BNC)

[17]

This here’s what – (BNC)

[18]

This here’s Celia. (BNC)

Dans le sous-corpus du BNC ne figure qu’un seul cas de here occupant la fonction de sujet :

[19]

Here’s as good as anywhere else. (BNC)

De plus, il y a 19 schémas et expressions idiomatiques (soit 14%) dont 12 apparaissent dans le cadre d’un toast porté (Exemples [20] à [23]) ; deux sont des constructions de type here’s hoping… ([24] et [25]) ; une est tirée du film ‘Casablanca’ ([26]), et quatre sont de type here’s me/us + gérondif ([27] à [30]).

[20]

here’s to a happy Christmas. (BNC)

[21]

Here’s to your controlling interest. (BNC)

[22]

Here’s to Schubert! (BNC)

[23]

Here’s mud in your eye (BNC)

[24]

Here’s hoping it is au revoir and not goodbye (BNC)

[25]

And here’s hoping we put paid to Fedorov too. (BNC)

[26]

here’s looking at us, kid! (BNC)

[27]

Here’s me goin’ on about my life, and you haven’t told me about yours. (BNC)

[28]

Here’s me taking you for a prancing little parson when all the while the cloth is a covering for a frustrated sex maniac. (BNC)

[29]

no parents, no roof over his head, on the streets, sleeping God knows where – and here’s me moaning on about waiting sixteen hours for my boyfriend to ring (BNC)

[30]

Here’s us, heading for trouble and God knows what else, and in the middle of you talking about Nordhausen, I start thinking of Peter. (BNC)

En observant la forme here’s dans le TEC, nous constatons que sur les 88 exemples, 91% (80) sont employés en tant qu’adverbes de lieu/manière, principalement en tête de phrase (conformément aux Exemples [7] à [14] ci-dessus). On ne trouve aucune occurrence de here en tant qu’adverbe de lieu, comme dans les Exemples [15] à [18] ; enfin, huit exemples (soit 9%) illustrent des emplois idiomatiques, dont six sont des toasts portés ([31] à [36]) et deux ([37] et [38]) sont des constructions de type here’s hoping.

[31]

Here’s to the enchanting lady at our table (TEC)

[32]

Here’s to one of those days, old boy! (TEC)

[33]

Here’s to the Third World (TEC)

[34]

Here’s to magnificent pictures (TEC)

[35]

Here’s to innocents with their hands full (TEC)

[36]

here’s to us (TEC)

[37]

Here’s hoping. (TEC)

[38]

here’s hoping that while inside they’d have been properly taught to keep their traps shut. (TEC)

Si l’on étudie maintenant les 114 exemples de here is dans le BNC, on obtient des résultats bien moins variés que pour l’emploi de here’s. 58% des occurrences (soit 66) sont des adverbes de lieu (à l’instar des Exemples [39] à [41]) :

[39]

“My work here is finished,” Ellis said (BNC)

[40]

The trouble here is that there’s no supervision (BNC)

[41]

The sun here is very strong (BNC)

Les 48 exemples restants, soit 42%, sont des adverbes de lieu ou de manière en position initiale avec une inversion sujet-verbe.

En revanche, dans le TEC, cet emploi de here en tant qu’adverbe de lieu ou de manière en position initiale représente 62% des occurrences de here is (123), sur un total de 198 exemples, comme dans les Exemples [42] à [45].

[42]

Here is the path I took (TEC)

[43]

Here is my friend Jeanin (TEC)

[44]

Here is how it happened (TEC)

Deux exemples de here utilisé comme sujet ont été relevés (Exemples [45] et [46]) :

[45]

Here is here (TEC)

[46]

France is France, here is here! (TEC)

Les 73 exemples restants, soit 37%, sont des adverbes de lieu.

Pour résumer, dans le BNC, here dans les constructions en here’s a tendance à être utilisé en position initiale en tant qu’adverbe de lieu ou de manière (115 here’s contre 48 here is). Dans les constructions en here is, here est plutôt utilisé en tant qu’adverbe de lieu en position médiane (66 here is contre 4 here’s). Dans le TEC, les formes pleines aussi bien que les formes contractées sont majoritairement employées en tant qu’adverbes de lieu ou de manière en position initiale mais il y a davantage de formes pleines que de formes contractées (123 occurrences contre 80). De plus, tandis que here is est utilisé exclusivement soit en tant qu’adverbe de lieu/manière en position initiale, soit en tant qu’adverbe de lieu en position médiane, dans les deux corpus, here’s se rencontre dans un certain nombre d’autres usages, au sens figuré ou dans les tournures idiomatiques (y compris les toasts). La fréquence de la forme here’s dans les tournures idiomatiques est de 14% dans le BNC contre seulement 9% dans le TEC. Here is n’est utilisé de façon idiomatique ou figurée dans aucun des deux corpus.

Par conséquent, il semblerait que la fonction déictique, plus susceptible d’être endossée par l’utilisation de la forme contractée here’s dans le BNC, est plus souvent exprimée sous la forme pleine here is dans le TEC. Puisque cette fonction discursive particulière apparaît le plus souvent dans les dialogues ou les conversations et que les contractions relèvent typiquement de la langue orale, il semblerait que le TEC relève d’un style plus formel, où les énoncés de langue orale sont peut-être prononcés par des personnages de fiction dans des registres plus proches de la langue écrite.

5.2Who’s vs. who is

Les mesures de fréquence pour who’s et who is se démarquent dans les données sur les contractions en raison du nombre très élevé de formes pleines dans le TEC et du nombre total d’occurrences des deux formes considérablement plus élevé dans le TEC que dans le BNC (voir Tableau 15). Le Tableau 16 montre que 71% des occurrences totales dans le TEC sont des formes pleines tandis que ces dernières représentent seulement 45% du nombre total des occurrences dans le BNC. Dans l’ensemble, l’utilisation combinée (c’est-à-dire des formes pleines et contractées) est 53% plus fréquente dans le BNC que dans le TEC.

Tableau 15.Fréquences brutes de la forme contractée who’s et de la forme pleine correspondante who is dans le BNC et dans le TEC
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Total Contractées Pleines Total
who’s vs. who is 415 334 749 337 823 1 160
Tableau 16. who’s et who is dans le BNC et dans le TEC en pourcentage du total combiné des formes contractées et pleines
Forme BNC TEC
who’s 55% 29%
who is 45% 71%

Who occupe deux fonctions dans who’s et who is : il peut être marqueur interrogatif comme en [47], ou pronom relatif comme en [48].

[47]

Who’s going to believe what I say? (TEC)

[48]

How nice to meet someone who is even aware of that (BNC)

Les très grandes différences quantitatives entre les deux corpus pourraient-elles s’expliquer par des différences de distribution fonctionnelle ? La tendance de la traduction à l’explicitation démontrée par d’autres études peut signaler une utilisation potentiellement plus récurrente de who comme pronom relatif dans les textes traduits, puisque l’une des fonctions des pronoms relatifs est de faire en sorte que les liens entre les propositions soient plus explicites. Afin de vérifier cette hypothèse, il est nécessaire de différencier l’usage de who comme marqueur interrogatif de celui de who comme pronom relatif dans les deux corpus. Dans un premier temps, il a semblé qu’une recherche de points d’interrogation dans les six à sept mots à droite de who’s ou who is révèlerait l’usage interrogatif de who. En effet, de nombreux cas peuvent être découverts de cette façon, par exemple [47] ci-dessus. Cependant, cette méthode plutôt sommaire ne permet pas de trouver l’exemple [49], dans lequel il y a quatorze mots entre who et le point d’interrogation :

[49]

And who is to say that even this publicity is not part of the divine plan? (TEC)

Elle écarte également l’exemple [50] dans lequel ne figure aucun point d’interrogation :

[50]

Who is that woman, asked James (TEC)

De la même façon, des occurrences comme [51] et [52] peuvent être prises en compte à tort :

[51]

but how can you fondle the daughter of the woman who is a stranger to you? (TEC)

[52]

So what do you think of that new man who is coming to your House? (TEC)

Pour s’assurer de l’identification exacte de la fonction, il est donc nécessaire d’analyser les lignes de concordance et leur contexte. En séparant ainsi l’emploi interrogatif de l’emploi relatif, il devient clair que le BNC contient davantage d’occurrences de who is interrogatif, avec une prédominance de who’s. Le TEC, en revanche, emploie plus fréquemment who en tant que pronom relatif avec who’s et, dans une plus large mesure, avec who is (voir Tableau 17).

Tableau 17.Fréquences brutes des occurrences du pronom interrogatif et relatif who’s et who is dans le BNC et dans le TEC
Forme BNC TEC
who’s (interrogatif) 243 108
who is (interrogatif) 168 147
Total (interrogatif) 405 237
who’s (relatif) 172 229
who is (relatif) 166 676
Total (relatif) 345 923

L’occurrence plus fréquente des formes interrogatives dans le sous-corpus du BNC peut être liée à une utilisation plus importante du discours direct dans les textes du BNC que dans ceux du TEC (cette question sera à nouveau soulevée dans la dernière partie de cet article). Cependant, la grande différence dans l’utilisation du pronom relatif nécessiterait une autre explication. Comme indiqué ci-dessus, il pourrait y avoir un lien entre l’emploi de propositions relatives et l’explicitation en traduction, en particulier parce que les propositions relatives de ce type ont deux fonctions, l’une d’entre elles consistant à fournir des informations supplémentaires : « les propositions relatives restrictives servent à définir l’antécédent, tandis que les relatives non restrictives apportent des informations additionnelles qui ne sont pas nécessaires à son identification »ll.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “restrictive relative clauses are used to establish the reference of the antecedent, while non restrictive relatives give additional information which is not required for identification”. (Biber et al. 1999 : 195). Les relatives sont restrictives en [53] et [54], et non restrictives en [55] et [56] :

[53]

He is a man who is known to like women; certainly most find him attractive. (BNC)

[54]

You aren’t thinking of the person who’s hanged herself (TEC)

[55]

He is not in good health, and he asks only that his nephew, Nathan, who is sixteen, shall be given the opportunity to work with the firm, starting at the lowest rung of the ladder, to learn the publishing business thoroughly. (BNC)

[56]

Medina, who’s dragging a wounded leg next to me, hands me a cigarette (TEC)

Si l’on considère que l’explicitation est une caractéristique des traductions, il est alors possible que les textes traduits révèlent une utilisation plus importante des relatives non restrictives. Une analyse qualitative des concordances a été menée pour différencier les propositions relatives restrictives des non restrictives, et pour vérifier l’hypothèse selon laquelle les relatives non restrictives seraient plus courantes dans le TEC que dans le BNC.

Dans le BNC, on constate que presque deux tiers des propositions relatives introduites par who is et un pourcentage encore plus élevé (85%) des propositions introduites par who’s sont utilisées pour définir l’antécédent et sont donc des propositions relatives restrictives. Ainsi, les propositions non restrictives ne représentent que 33% et 15% respectivement. Dans le TEC, en revanche, 50% des propositions avec who is et 33% de celles avec who’s sont non restrictives. La proposition relative introduite par who apportant des informations supplémentaires est en effet plus employée dans le TEC que dans le BNC, ce qui corrobore l’affirmation selon laquelle le texte traduit exploite davantage les caractéristiques lexicales, syntaxiques et discursives pour expliciter les informations, que ne le font généralement les textes non traduits appartenant aux mêmes genres.

En ce qui concerne l’utilisation de who’ve, who have, who’d, who did, who had et who would (Tableaux 18 et 19), on remarque une fois encore que le TEC offre un nombre total d’occurrences considérablement plus élevé de la forme who. Une étude plus approfondie du co-texte serait nécessaire pour distinguer l’emploi interrogatif de l’emploi relatif. Elle n’a toutefois pas encore été menée. Ainsi, il reste à vérifier si, comme l’on pourrait s’y attendre dans le TEC sur la base des résultats ci-dessus, le pronom relatif et les propositions relatives restrictives sont majoritaires pour ces formes.

Tableau 18.Fréquences brutes des occurrences de who’ve et who have dans le BNC et dans le TEC
Formes BNC TEC
Contractées Pleines Total Contractées Pleines Total
who’ve vs. who have 27 135 162 35 405 440
Tableau 19.Fréquences brutes des occurrences de who’d, who did, who would et who had dans le BNC et dans le TEC
Forme BNC TEC
who’d   246   236
who did   127   194
who would   386   437
who had 2 003 2 477
Total 2 762 3 344

5.3Les traducteurs individuels

Baker (2000 : 245) aborde le développement d’une méthodologie visant à étudier le style des traducteurs, qu’elle définit comme « une sorte d’empreinte qui s’exprime à travers un éventail de caractéristiques linguistiques aussi bien que non linguistiques »,mm.La citation originale de Mona Baker est la suivante : “a kind of thumbprint that is expressed in a range of linguistic-as well as non linguistic-features”. et elle illustre comment deux traducteurs peuvent chacun manifester des schémas et habitudes linguistiques différents. Elle utilise des mesures de ratios type token standardisés, la longueur moyenne des phrases, la fréquence ainsi que les schémas de construction du verbe say et tente de relier ces résultats à l’expérience des deux traducteurs en question, leur environnement de travail immédiat (par exemple l’immersion dans la langue source ou cible), mais aussi au choix et à l’accessibilité du matériel source traduit.

Dans la même veine, une étude en cours se concentre sur des traducteurs individuels et leur tendance à utiliser les formes contractées. Il apparaît clairement, à partir des analyses contrastives préliminaires des pratiques de deux traducteurs, Peter Bush et Dorothy S. Blair, qu’il existe d’énormes différences entre eux ; Bush préfère utiliser une gamme de formes contractées plutôt que leur forme pleine correspondante dans 67% des cas, tandis que Blair n’opte pour les contractions que dans 24% des cas. Il est néanmoins important de noter à ce stade que cette image d’un traducteur qui utilise beaucoup les contractions et d’un autre qui n’en utilise que très peu est trop simpliste, et peut dissimuler des variations plus subtiles dans leurs travaux respectifs. Si l’on examine les textes individuels plus attentivement, il est possible de déceler, dans le cas de Bush, une tendance à la contraction dans certaines de ses traductions, et une préférence pour les formes pleines dans d’autres. Ces formes pleines apparaissent dans les traductions de textes autobiographiques ou de fiction d’un auteur en particulier, Juan Goytisolo ; ce dernier emploie très fréquemment la narration à la première personne mais peu de dialogue, et parfois du discours rapporté. En revanche, les contractions abondent dans les traductions que Bush a faites d’un scénario et de textes de fiction écrits par deux autres auteurs, qui tous deux utilisent considérablement le dialogue. Ainsi, le genre peut jouer un rôle dans les différentes stratégies d’emploi des contractions à l’œuvre ici ; les différences dans le recours au discours direct entre l’autobiographie, la fiction et les scénarios se reflètent, dans une certaine mesure, dans ces traductions. Étant donné l’analogie entre les schémas de contractions dans la traduction des trois œuvres de Goytisolo, on peut suggérer que le texte source et le style de son auteur exercent davantage d’influence sur la décision du traducteur d’utiliser ou non les formes contractées qu’une tendance à la contraction qui serait propre au style du traducteur.

Dans le cas de Blair, qui a tendance à éviter les formes contractées, le comportement qu’elle adopte est tout à fait cohérent tout au long des textes de fiction qu’elle a traduits et qui font partie du TEC. Ces textes sont écrits par deux auteurs différents : Assia Djebar et Amin Maalouf. Cependant, si nous essayons une fois encore de faire le lien entre les formes contractées et le style narratif du texte, nous remarquons que les textes contiennent beaucoup de narration à la première personne et peu de dialogues. Ainsi, il est possible que les différences entre ces deux traducteurs soient très fortement liées, d’une part au genre littéraire et d’autre part à la structure narrative. Aucune étude n’a encore été menée pour déterminer dans quelle mesure la structure narrative ou le style narratif utilisé dans les traductions reflètent ceux des textes sources ou de textes comparables en langue cible ; de même, la possibilité selon laquelle les traducteurs préfèreraient, généralement, certaines structures narratives reste à explorer.

Une remarque supplémentaire peut être faite concernant l’étude des formes contractées et la pratique de chacun des traducteurs. Nous avons vu précédemment que les occurrences de who’s, et plus encore celles de who is, sont plus fréquentes dans le TEC que dans le BNC. Si nous examinons les concordances de who is dans le TEC et que nous les classons selon les fichiers – c’est-à-dire les œuvres littéraires, d’où elles sont extraites –, nous pouvons observer que la moitié de ces fichiers contient au maximum cinq cas de who is, et neuf fichiers (soit environ 10% du corpus) n’en contiennent aucun. Aussi est-il très probable qu’un petit nombre de traductions contienne une grande concentration de who is. C’est en effet le cas : 36% de toutes les occurrences de who is se trouvent dans des fichiers qui représentent approximativement 10% du corpus et 20% de toutes les occurrences de who is sont le fait de Giovanni Pontiero, traducteur de quatre ouvrages de fiction écrits par deux auteurs, José Saramago et Clarice Lispector. Ainsi, dans la totalité du TEC, who is apparaît approximativement une fois tous les 10 000 mots, mais dans le travail de Pontiero, who is apparaît deux fois plus souvent, c’est-à-dire une fois tous les 4000 mots. Cela pourrait être dû à plusieurs raisons : une préférence personnelle et générale pour les formes pleines plutôt que pour les formes contractées ; un traducteur plus enclin à utiliser davantage les outils d’explicitation et d’explication ; l’influence d’une langue source qui utilise ces outils plus que l’anglais ; des caractéristiques spécifiques au style des auteurs qui entraînent un usage intensif des propositions relatives introduites par who, etc. L’analyse requise pour approfondir cette problématique dépasse le cadre du présent article. Cependant, quelques réflexions autour de cet exemple ainsi que la comparaison entre Bush et Blair sont utiles à plus d’un égard ici. Elles montrent comment des informations sur les auteurs et sur les traducteurs peuvent être intégrées à ce genre d’analyses faites à partir de corpus comparables. Elles montrent également l’importance de la multiplicité des approches des données et de leur analyse. En effet, formuler des généralisations sur une caractéristique selon sa fonction dans les textes traduits offre, certes, une perspective, mais la relier à d’autres facteurs tels que le style et/ou la pratique des traducteurs et des auteurs, la langue source, le genre des textes, etc., peut fournir d’autres explications, soit complémentaires, soit contradictoires. D’une certaine manière, cela montre également les limites méthodologiques des corpus comparables ; ils sont très utiles en ce qu’ils nous permettent d’étudier une langue traduite comme forme distincte de production linguistique influencée par des contraintes spécifiques. Mais afin de mettre davantage en lumière ces influences et ces motivations, nous pourrions avoir besoin de recourir à d’autres données, par exemple aux textes sources, à d’autres travaux écrits par les traducteurs, aux informations sur le processus de révision dont une traduction a fait l’objet, etc.

6.Conclusions

6.1Quantité vs. qualité

Dans cet article, j’ai présenté un nombre relativement élevé de données quantitatives, aussi bien en termes de fréquences brutes qu’en termes de pourcentages relatifs des occurrences. Dans mon introduction, j’ai exposé des points de vue sur la traductologie de corpus qui mettent en garde contre les approches purement quantitatives, qui mènent à de vastes généralisations mais ignorent de nombreux facteurs qui auraient pu avoir une incidence sur ce qui a été observé dans les données. Ce point de vue se confirme tout au long de l’article : les données quantitatives examinées ici, bien que loin d’être dénuées de sens, ont requis une analyse d’ordre plus qualitatif lorsqu’il a été question de vérifier les hypothèses émises et tenter d’expliquer les schémas observés.

Mon attention s’est, en premier lieu, portée sur les formes contractées à partir de l’environnement textuel immédiat des occurrences de promise (that). Ainsi, c’est une analyse qualitative de l’omission et de l’inclusion de that (considéré comme optionnel) qui a suscité mon intérêt pour les formes contractées. La première étape a toutefois consisté en un recensement fastidieux des occurrences de ces formes contractées. Cet exercice a seulement révélé que les formes contractées étaient plus fréquentes dans le BNC que dans le TEC. L’étape suivante a consisté à comparer ces occurrences avec les occurrences de leur forme pleine correspondante, une fois encore d’un point de vue quantitatif. Nous en avons conclu qu’il y avait une plus grande tendance, dans les textes du TEC, à préférer les formes pleines aux formes contractées et, dans les textes du BNC, à préférer les formes contractées aux formes pleines. Ainsi, cette deuxième étape a fourni des informations non seulement sur les emplois et les variations, mais également sur les tendances à utiliser une forme plutôt qu’une autre.

En s’intéressant particulièrement à here’s et here is, et en replaçant toutes ces occurrences dans leur co-texte – considérant ainsi les fonctions syntactiques, sémantiques et pragmatiques de ces constructions –, il s’est avéré que la fonction discursive des formes diffère d’un corpus à l’autre. Cela nous a conduit à aller au-delà du simple dénombrement des schémas syntactiques et nous a permis de révéler les effets des choix et des préférences observés précédemment. De même, l’analyse des différentes fonctions des propositions relatives introduites par who’s et who is dans les deux corpus permet, non seulement, de confirmer des différences qualitatives en termes de distribution, mais aussi de rattacher provisoirement ces résultats à ceux d’autres études.

En isolant un certain nombre de textes traduits par deux traducteurs différents et en découvrant des différences majeures dans l’emploi des formes contractées, il semblerait que nous ayons fait un pas vers l’identification du style particulier d’un traducteur, comme dans Baker (2000). Cela devait approfondir l’analyse des choix et préférences en reliant ces facteurs aux traducteurs en question et à leurs textes. Il y a des preuves flagrantes de différences quant à l’emploi des formes contractées dans la pratique des deux traducteurs choisis. Cependant, en portant l’analyse au niveau des textes individuels, nous nous sommes aperçu que ce classement des textes par traducteur est trompeur, en ce sens qu’il cachait, dans le cas de Peter Bush, des variations au niveau des traductions individuelles ; de même, il dissimulait la cohérence des structures chez Dorothy Blair. Au niveau quantitatif, j’ai simplement constaté que les variations observées entre les traducteurs pourraient être dues à la langue source, au registre de langue plus ou moins soutenu du texte source, ou au style du traducteur lui-même. L’éloignement ou la proximité vis-à-vis de la langue source, de la culture, etc., ou même l’intégration dans le système littéraire de la langue cible peuvent avoir un effet sur l’apparition, chez les traducteurs, de schémas qui, en apparence, reflètent ou entrent en conflit avec les normes d’écriture littéraire de la langue cible ; Baker (2000) a suggéré qu’il s’agissait là de possibles explications. Néanmoins, si l’on considère les traductions elles-mêmes et non les textes sources, nous pouvons noter que le genre et la structure narrative ont une incidence significative sur ces variations.

6.2Registre, genre, caractéristiques linguistiques et études complémentaires

Les résultats de l’analyse de Biber et al. (1999 : 1129) démontrent que

les formes contractées sont fortement associées à la langue parlée… les contractions verbales sont plus susceptibles de figurer dans les conversations, mais on les rencontre fréquemment dans des registres écrits qui emploient beaucoup le style parlé, tels que les écrits de fiction. La fréquence des contractions dans la fiction peut s’expliquer en grande partie par le compte-rendu direct du discours oral dans ces registres.nn.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “contractions are strongly associated with the spoken language…verb contractions are most likely to occur in conversation, but also occur frequently in written registers with a large admixture of spoken style such as fiction writing. The common occurrence of contractions in fiction…can be largely explained by the direct reporting of spoken discourse in those registers.”

En se penchant sur les formes contractées de not telles que don’t, doesn’t, didn’t et leurs formes pleines, on constate que le TEC recense plus de formes au passé, alors que le BNC compte davantage de formes au présent. Cela peut aussi être lié à une proportion plus élevée de discours direct dans le BNC. Un simple calcul du nombre de guillemets montre qu’il y en a six fois plus dans les textes du BNC que dans ceux du TEC, mais il ne s’agit certainement pas là d’une quantification précise du discours direct par rapport au discours indirect. Il semble donc pertinent d’élargir cette étude afin d’examiner de plus près la représentation de la pensée et du discours oral ainsi que les structures narratives à la fois dans le TEC et dans le sous-corpus du BNC. Les observations faites par Biber et al. (1999 : 1130) sur les contractions de BE dans les textes de fiction ne sont pas corroborées par les relevés effectués dans le TEC, où I’m s’avère moins fréquent (il apparaît plus bas dans la liste). Il pourrait s’agir d’une première indication de la fréquence moindre de la narration à la première personne dans le TEC que dans les textes de fiction en général et que dans ceux du sous-corpus du BNC étudiés ici. Les observations faites dans cet article sur l’emploi des modaux et des temps grammaticaux pourraient également être approfondies par l’analyse des modaux qui ne sont pas étudiés ici. Nous pourrions ainsi vérifier l’hypothèse selon laquelle l’emploi des modaux contractés est considérablement plus faible dans le TEC que dans le sous-corpus du BNC et dans le corpus de textes de fiction étudié par Biber et al. (1999).

L’étude de say et tell (that) (Olohan et Baker 2000) mentionnée précédemment a été une première étape dans l’étude concrète, grâce à un corpus comparable, des procédés inconscients d’explicitation en traduction. L’explicitation en traduction a été abordée précédemment dans des travaux en traductologie (par exemple Blum Kulka 1986), mais l’attention a davantage été portée sur les procédés conscients d’explicitation. Suite à l’étude susmentionnée, on a considéré qu’il serait intéressant d’étudier d’autres éléments syntaxiques optionnels, en partant de l’hypothèse selon laquelle l’explicitation implique généralement l’emploi d’une forme plus longue de préférence à une forme plus courte, laissant moins de place à l’ambiguïté. Olohan (2001) présente l’analyse quantitative préliminaire d’un certain nombre d’autres structures syntaxiques optionnelles dans le TEC et le BNC, et les résultats suggèrent une tendance générale à l’explicitation syntaxique dans le TEC, probablement inconsciente. Même si les contractions n’entrent pas nécessairement dans le cadre des constructions syntaxiques facultatives et n’engendrent habituellement aucune ambiguïté (sauf, comme noté plus haut, dans le cas de ’s qui est à la fois la contraction de has et de is, quoique le contexte immédiat résolve généralement cette ambiguïté), on peut considérer l’utilisation de la forme pleine comme une sorte d’explicitation. De plus, l’analyse du registre par Biber (Biber 1998 et Biber et al. 1998) suggère l’existence d’un lien entre l’omission de that et les contractions. Selon les schémas de co-occurrence que Biber suggère sous-jacents aux cinq dimensions principales de l’anglais, l’omission de that et les contractions figurent parmi les trois premières caractéristiques situées à l’extrémité positive de l’échelle (Dimension 1) ; ceci est révélateur de leur tendance à apparaître dans des textes qui ont une même fonction. Ces caractéristiques qui, avec d’autres encore, forment la Dimension 1, sont associées aux « objectifs impliqués et non informationnels, liés à une intention principalement interactionnelle ou affective et aux circonstances de production en ligne »oo.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “involved, non informational focus, related to a primarily interactive or affective purpose and on line production circumstances”. (Biber et al. 1998 : 149). Biber et al. poursuivent la description de certaines de ces caractéristiques positives, parmi lesquelles les omissions de that et les contractions, considérant qu’elles constituent une structure de surface réduite qui aboutit à un « contenu plus généralisé et moins explicite »pp.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “more generalized, less explicit content”. (ibid.). Ils font état de deux paramètres de communication distincts, l’intention de l’auteur (informationnel vs. impliqué) et les contextes de production (circonstances permettant une révision attentive vs. contraintes de production en temps réel), qui influent sur la position des textes sur l’échelle de la Dimension 1. La Dimension 1 est ainsi catégorisée « production impliquée vs. production informationnelle »qq.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “ involved versus informational production”. (ibid.). Si l’on associe cela aux résultats ci-dessus, il semblerait que les textes du BNC soient plus impliqués, plus généralisés, moins explicites et moins modifiés que ceux du TEC ; l’intention des auteurs des textes de fiction est davantage impliquée tandis que celle des traducteurs l’est moins. La structure de surface n’est pas réduite de la même manière pour le traducteur et l’auteur de fiction, si bien que la traduction est plus explicite, moins généralisée aussi bien dans sa forme que dans son contenu (et peut-être révisée plus soigneusement). Une étude plus approfondie est nécessaire afin de déterminer si les autres caractéristiques relevant de « l’impliqué » selon Biber sont également moins présentes dans le TEC que dans le BNC, et que dans les textes de fiction d’une façon générale. De la même manière, il est possible d’aborder l’étude par l’autre bout de l’échelle et d’étudier les caractéristiques linguistiques davantage représentatives d’une production « informationnelle » et qui devraient apparaître dans une moindre mesure dans la fiction en général. Sur la base des résultats obtenus jusqu’à présent, on pourrait émettre l’hypothèse qu’il y a plus de de caractéristiques « informationnelles » dans le TEC que ce qui serait attendu pour des écrits de fiction.

D’après Biber et al. (1999 : 1129), d’autres facteurs favorisent l’emploi des contractions : ainsi, « les contractions verbales apparaissent principalement après des pronoms sujets, plutôt qu’après des syntagmes nominaux complets. »rr.La citation originale de Biber et al. est la suivante : “ verb contractions occur predominantly after pronoun subjects, rather than after full noun phrases”. Compte tenu des similitudes en termes de taille et de genre entre les deux corpus utilisés ici à des fins comparatives, il est frappant de constater que, pour la plupart des formes analysées ci-dessus, la fréquence totale des formes pleines et contractées cumulées est plus élevée dans le BNC que dans le TEC. Cela pourrait indiquer un plus faible taux de pronoms personnels, démonstratifs et relatifs dans le TEC que dans le BNC. L’hypothèse de l’explicitation anticiperait ce phénomène, dans la mesure où préférer la répétition des noms à l’emploi de proformes indiquerait une explicitation ; une étude plus approfondie pourrait se concentrer sur l’emploi de pronoms autres que ceux présentés dans cet article.

Finalement, l’analyse qualitative des occurrences des contractions comme celle faite pour here’s/here is et who’s/who is et la prise en compte de l’utilisation de la langue par chaque traducteur dans des textes individuels et dans des genres spécifiques, pourraient mettre au jour la fonction rhétorique des formes contractées et de leurs formes pleines correspondantes en centrant davantage la discussion sur les normes discursives et les notions d’intention textuelle.

Ainsi, en plus de présenter une étude sur l’emploi des contractions dans le Translational English Corpus et une sous-section similaire du British National Corpus, cet article a tenté de rassembler des analyses linguistiques, qualitatives et quantitatives et de confirmer l’importance du rôle de l’analyse du co-texte dans l’étude de traductions sur corpus. Il met en garde contre les résultats d’analyses quantitatives qui cachent un nombre important de variations au sein des données et soulève la question de l’influence du genre, du registre, de la fonction discursive et du style narratif sur le comportement et la production finale des traducteurs. Il met aussi l’accent sur l’interrelation et l’interdépendance des caractéristiques linguistiques ainsi que sur la nécessité de considérer plus attentivement les causes et l’effet de l’apparition et de la coexistence de ces caractéristiques.

Remerciements

Je tiens à remercier Mona Baker, Silvia Bernardini et John Sinclair pour leurs commentaires à propos d’une version précédente de cet article.

Remarques

1. Wordsmith Tools, conçue par Mike Scott et distribuée par Oxford University Press, est une suite intégrée de programmes qui permet d’étudier des corpus.
2.Le TEC est disponible sur le site web du School of Modern Languages de l’Université de Manchester : http://​www​.art​.man​.ac​.uk​/sml et peut être également consulté sur http://​ronaldo​.cs​.tcd​.ie​/tec.
3.Les tokens réfèrent au nombre de mots dans un texte, y compris les mots répétés. Les types font référence au nombre de mots distincts dans un texte, c’est-à-dire, sans compter les répétitions.
4.Voir la note précédente pour une brève explication concernant les types et les tokens.
5.L’astérisque (*) sert de joker dans tout l’article pour dénoter une suite de caractères, et non pour indiquer un élément irrecevable comme c’est généralement le cas dans les publications de linguistique.
6.Une analyse ultérieure (voir les Tableaux 10 et 11) distingue deux formes pour he’s et she’s, respectivement he is et he has, et she is et she has.

Notes

aLa citation originale de Ian Mason est la suivante : “[…] translators tend towards explicitation irrespective of the languages or direction of translating, rather than the hypothesis that translators respond to contrastive language norms for the use of junction”.
bLa citation originale de Ian Mason est la suivante : “spontaneously sourced texts in each language”.
cLa citation originale de Ian Mason est la suivante : “the rhetorical purposes which give rise to them”.
dLes citations originales de Maria Tymoczko sont les suivantes : “scientific”, “prove the obvious”.
eLa citation originale de Maria Tymoczko est la suivante : “locked into the translation norms of the present, … presupposing such norms in the construction of corpora”.
fLa citation originale de Mona Baker est la suivante : “two separate collections of texts in the same language: one corpus consists of original texts in the language in question and the other consists of translations in that language from a given source language or languages… both corpora should cover a similar domain, variety of language and time span, and be of comparable length”.
gPlus connue sous le nom de « imaginative writing section ».
hLes traducteurs ont estimé que le tableau, dans l’article original, comportait une erreur : pour le TEC, la colonne correspondant aux formes pleines était entièrement grisée, alors que l’auteur indique dans le corps de son texte que ce sont les cases contenant les valeurs les plus importantes qui doivent l’être. Nous avons cru bon de corriger cette erreur.
iL’article original indiquait erronément « have » : cette erreur a été ici corrigée.
jLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “the adverbials here and there show the use of deictic place reference in conversation…In fiction, the use of here, there, now and then is similar to conversation, though referring to the fictional world of the text rather than the real world.”
kLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “more or less fixed patterns”.
lLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “restrictive relative clauses are used to establish the reference of the antecedent, while non restrictive relatives give additional information which is not required for identification”.
mLa citation originale de Mona Baker est la suivante : “a kind of thumbprint that is expressed in a range of linguistic-as well as non linguistic-features”.
nLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “contractions are strongly associated with the spoken language…verb contractions are most likely to occur in conversation, but also occur frequently in written registers with a large admixture of spoken style such as fiction writing. The common occurrence of contractions in fiction…can be largely explained by the direct reporting of spoken discourse in those registers.”
oLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “involved, non informational focus, related to a primarily interactive or affective purpose and on line production circumstances”.
pLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “more generalized, less explicit content”.
qLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “ involved versus informational production”.
rLa citation originale de Biber et al. est la suivante : “ verb contractions occur predominantly after pronoun subjects, rather than after full noun phrases”.

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