Le loup a l’âme bonne, ou quand le lupus revêt la peau du lepus
Le cas d’une fable de François Le Moine (1656)
La fable de Phèdre Lupus et Vulpes iudice Simio (I, 10) est assez connue: le loup accuse de vol le renard, lequel, de son côté, nie tout crime. Le juge singe, qui connaît bien la mauvaise réputation des deux contendants, ne s’enquiert pas trop de savoir ce qui s’est effectivement passé et condamne les adversaires au partage du butin. François Le Moine, avocat normand du XVIIe siècle dont il nous reste un fablier manuscrit, reprend cet apologue, mais avec un changement de taille: le singe reconnaît au loup une âme bonne et il le considère incapable de mystifier la vérité. La surprise devant ces affirmations a déclenché une recherche qui nous a mené sur les traces d’un lupus qui, à un moment donné, dans la tradition des Isopets, est devenu un lepus; ce voyage à rebours permet de mieux comprendre cette sentence du juge et de formuler une hypothèse sur la diffusion des Isopets, bien plus vaste qu’on ne le croit habituellement.